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Un nouvel article de Anthropocène nous plonge dans une perspective surprenante : des matériaux de construction « vivants », capables de photosynthèse, de fixer du carbone et de se raffermir au fil du temps. Le constat initial est clair : le procédé de fabrication traditionnel des infrastructures modernes (ciment, acier, plastique) est lourdement émetteur de CO₂ ; remplacer ou compléter ces matériaux par des alternatives biologiques pourrait permettre de réduire l’empreinte carbone globale.
L’équipe de l’ETH Zurich a, selon l’article, mis au point un gel mêlant un hydrogel polymère transparent à des cyanobactéries – ces algues bleu-vert capables de capter la lumière, absorber le CO₂ et précipiter du carbonate de calcium.  Ce gel est moulable, imprimable en 3D, puis évolue dans le temps : les bactéries croissent, produisent des minéraux, et la structure se durcit. En laboratoire, chaque gramme absorbait environ 26 milligrammes de CO₂ sur 400 jours, et la démonstration a produit deux formes en “tronc d’arbre” capables de capter jusqu’à 18 kg de CO₂ par an – l’équivalent d’un pin de vingt ans.
Sur le plan de la résonance avec le projet « La Nouvelle Humanité », cette innovation ouvre des pistes puissantes. D’abord, elle incarne l’idée d’une sobriété technologique avancée : il ne s’agit pas de renoncer à toute technologique mais d’intégrer le vivant, de co-créer des systèmes qui travaillent avec la nature plutôt que contre elle. Le clan des Brevelles (année 2090) vit dans un monde de technologies avancées mais intégrées dans un écosystème circulaire et bio-généré : ce type de matériau est exactement dans cette veine.
Cependant, une lecture critique s’impose : en dépit de l’enthousiasme, l’article mentionne que la démonstration reste en laboratoire, à des échelles réduites. L’absorption (26 mg CO₂/g / 400 jours) est encourageante mais demeure modeste à l’échelle des besoins réels de décarbonation des infrastructures mondiales. Le passage à l’échelle, la durabilité des matériaux sur plusieurs décennies, les coûts, la logistique de maintenance, l’acceptation réglementaire, l’intégration aux normes de construction existantes : tout cela reste à vérifier. Par exemple, qu’en est-il des propriétés mécaniques à long terme ? Des conditions réelles (climat, pollution, impact humain) ? L’article ne détaille pas ces phases de transition.
Ensuite, il faut interroger l’usage symbolique : valoriser des matériaux « vivants » peut créer une certaine rupture philosophique dans notre rapport à l’espace bâti. Le bâtiment cesse d’être un objet inerte pour devenir un organisme ou un système dynamique. Cela suppose un changement de mentalité pour les acteurs de la construction, les concepteurs, les habitants. La question est : sommes-nous prêts à habiter, travailler, interagir avec des environnements « bio-actifs » ? Et quels en sont les impacts en matière de santé, sécurité, maintenance ?
Alors, que peut-apporter le Think Tank La Nouvelle Humanité dans ce contexte ? Il peut jouer un rôle de médiation visionnaire entre cette techno-innovation et son ancrage dans une culture de sobriété et d’intégration systémique. Il peut proposer des lignes directrices pour que ces nouveaux matériaux ne deviennent pas de simples « gadgets verts » mais participent réellement à une transformation plus profonde : un bâti qui respire, qui coopère, qui s’inscrit dans un cycle de vie circulaire, qui invite les habitants à un rapport renouvelé à l’habitat. Il peut également articuler la dimension humaine : comment les communautés vivent-elles dans de tels environnements ? Comment l’habitat vivant transforme-t-il la sociabilité, la sensibilité, l’intelligence collective ? Enfin, il peut favoriser l’évaluation critique : quels sont les risques d’industrialisation à outrance, d’effet rebond, de green-washing ? Il peut promouvoir des expérimentations à taille réelle (écolieux pilotes) où ces matériaux seraient intégrés dans des habitats communautaires, en lien avec les valeurs du clan des Brevelles : sobriété, technologie sobre, recyclabilité, bio-génération.
L’article de Anthropocène invite à un nouveau paradigme de construction : non plus un mur figé mais un organisme en devenir, absorbant, se renforçant, participant activement à la vie du lieu. Pour La Nouvelle Humanité, c’est un signal que la réinvention de l’habitat ne se joue plus seulement dans l’isolation ou l’énergie renouvelable, mais dans la co-création avec le vivant. Le défi reste large : passage à l’échelle, robustesse, coût, acceptation. Mais c’est un horizon stimulant, cohérent avec nos valeurs de sobriété enrichie, et qui mérite que nous le suivions, l’emmenions, le personnalisions.
Sources :
- Ces nouveaux matériaux de construction sont vivants, photosynthétiques et avides de carbone. – Anthropocene Magazine